To fall in love and fall in debt to alcohol and cigarets
LOVE AND PEACE OR ELSE#
Bords de l'Erdre, 15-03-09
J'ai marché longtemps. Je n'ai pas
cessé de penser à toi, si ce n'est quand je suis passée devant
chez Enora. Elle aussi me manque. Mais passée sa porte, tu m'es
revenu à l'esprit. Tu m'empoisonnes, mais d'un autre côté, ça me
fait un bien fou.
Maintenant, je suis assise sur ce banc, l'eau
presque à mes pieds. J'entends les grondements sourds des navettes
qui quittent la berge. Face à moi se dressent, dans un orgueil
injustifié, 5 immeubles. Cinq barres de béton, de plastique et de
verre qui brille en plein soleil.
Mon cœur bat à toute allure. Je suis
essoufflée, je suffoque presque ; je ne sais pas pourquoi. Les
bateaux troublent le vide et le calme de la rivière et dérangent
les canards, qui s'envolent en ricanant. Ils semblent se moquer de
moi. Ou de toi, peut-être.
J'attends encore de te voir. C'est
totalement impossible, bien sûr, mais j'espère encore que tu vas
apparaître, au détour d'un chemin, sur le navibus, que tu vas me
voir. Me serrer dans tes bras et me demander ce qui se passe, puisque
je suis en train de pleurer.
J'aimerais t'avouer mes faiblesses. Te dire tout ce qui me ronge, à commencer par toi. Mais j'ai peur de t'effrayer, que tu t'éloignes moi. Ça me tuerait, tu sais.
Le froid commence à m'engourdir, et je ne suis pas calmée. Les larmes ont déjà séché, mon masque a repris le dessus. Mais à l'intérieur, mon cœur continue sa course.
J'ai changé d'endroit, je voulais voir
le soleil, qu'il me chauffe la peau, à défaut du reste. Mais les
rayons sont bas, ils ne réchauffent presque plus l'air. Il commence
à se faire tard. Je devrais rentrer, mais je n'en ai pas la moindre
envie. J'allume une cigarette.
J'ai croisé un couple qui
attendait, sur un banc un peu plus loin, de prendre ma place, comme
dans une file d'attente. Ça m'a choquée. Tout ce temps, ils m'ont
observée, guettant le moment où je partirais. Ils m'ont vue écrire,
ils ont vu les soubresauts de mon dos, ils m'ont vu prendre un cachet
pour essayer de calmer mon cœur. L'homme m'a jeté un regard
empreint de compassion. J'ai eu envie de le tuer. Je ne veux pas de
pitié.
La nicotine me vide le cerveau. Ça aussi, je voudrais te le dire. Que je fume de plus en plus. Que bientôt, je serai accro. Mais il va falloir perdre la face, revenir sur tous les discours que j'ai faits à presque tout le monde, dont toi. La cigarette a été la plus forte. Les autres, les non-fumeurs, ils ne comprennent pas. Ils m'engueulent, me disent que je ruine ma vie inutilement. Ils s'inquiètent pour moi, je le sais. Mais c'est mon seul moyen de penser à toi sans penser à rien. Que ton image ne me fasse que du bien, sans ce sentiment omniprésent qui me tord le cœur. Je rêve de nous, marchant main dans la main sur ce chemin au bord de l'eau où je suis si seule. Une cigarette au coin de la bouche. Je crois que tu me comprendrais si je t'avouais que je fume.
Le soleil s'est caché derrière les arbres. Pas un seul des visages que je croise n'a l'air triste. Tous ces gens, en ce dimanche après-midi, ils sont tous heureux. Tous, ils sourient. Certains se demandent pourquoi je ne fais pas comme eux. Pourquoi je ne suis pas de la partie, pourquoi je ne prends pas part au grand bal de la tristesse masquée.
Je me demande ce que tu fais, en ce
moment. Je voudrais tellement être en train de te parler. Je me sens
tellement bien avec toi, malgré mon cœur qui se serre à chacun des
sourires que tu me fais. J'aimerais que tout soit simple, pouvoir
prendre ta main à tout moment, te glisser un mot doux à l'oreille
et un baiser au coin de tes lèvres.
J'ai somnolé sur le banc. Quand j'ai ouvert les yeux, un avion volait au dessus de moi. La fumée de ses réacteurs déchirait le bleu parfait du ciel. J'ai bien peur de tomber dans le cliché, mais j'ai pensé à tes yeux.
En rentrant, j'ai mis du temps à comprendre où j'étais. A l'arrêt du Petit Port, j'ai encore espéré que tu avais passé l'après-midi au bowling, et que tu sortirais, dans la plus grande des coïncidences.
Je suis... stupide.